Questions en français
Q. Pouvez-vous nous dire comment vous vous sentez après cette semaine et la perspective de cette première finale dans un Masters 1000 ?
R. C’est super. Je connais cet endroit par cœur. Ici, c’est la salle de ping-pong normalement. Je me sens chez moi. Mais c’est difficile de réaliser ce qui se passe, parce que nous avons juste joué match par match. Nous n’avions pas de grandes ambitions en entrant dans le tournoi. Nous voulions simplement prendre du plaisir, et gagner le premier tour, c’était une pression. Après avoir gagné ce premier match, nous nous sommes sentis libérés et nous avons très bien joué. Nous avons juste joué un match après l’autre, un point après l’autre et nous avons avancé. Aujourd’hui, c’était plus difficile parce que nous avons commencé à réaliser qu’il se passait quelque chose, parce que nous jouions sur le court central. Le court central est toujours plus difficile à gérer car il est beaucoup plus grand que les autres courts sur lesquels nous avons l’habitude de jouer. Donc nous savions qu’il se passait quelque chose de différent et il a fallu gérer. Sur le plan du tennis, c’était différent aussi. Aujourd’hui, psychologiquement, la situation était difficile à gérer, nous avons eu beaucoup de balles de break et nous ne les avons pas converties. Je ne sais pourquoi nous avons raté ces occasions, mais c’était mieux de les avoir que de ne pas les avoir. Nous étions un peu frustrés tout de même. Finalement, nous avons pu remporter le premier set. Parfois quand on a beaucoup d’occasions et qu’on les rate, ça se retourne contre vous, mais cette fois-ci nous avons réussi à bien jouer et ça a bien tourné pour nous. Sans doute la fatigue nous a enlevé de la pression.
Q. Vous ne semblez pas du tout dans l’émotion à l’idée de cette première finale ?
R. Bien sûr que je suis dans l’émotion ! Vous ne le voyez peut-être pas, le match est terminé depuis un moment, mais à la fin du match, j’étais très ému. Mais comme je l’ai dit, je suis très fatigué aujourd’hui, ce n’était pas facile. Je me sentais plus heureux hier. J’ai trente ans, j’ai arrêté ma carrière de joueur il y a quelques années et je suis devenu coach. Je sais ce que vaut cette finale. Je suis content de jouer au tennis, j’adore le tennis. Je gagne ma vie grâce au tennis. Et maintenant, j’apprécie cette finale peut-être plus que n’importe quel autre joueur parce que je sais ce que ça représente. Je vis dans le moment présent. Je ne pense pas au classement, ni à ce qui va se passer après. Nous sommes juste là, chez nous, en finale. Le Prince sera là, c’est bien pour la Fédération monégasque, c’est fabuleux.
Q. Pourquoi avez-vous arrêté votre carrière pour la reprendre plus tard ? Vous aurez votre meilleur classement lundi, quoiqu’il arrive. Pouvez-vous nous parler de votre histoire de joueur de tennis ?
R. Je jouais très bien quand j’ai commencé. J’ai joué des années dans des Futures, je suis arrivé à la 400e place mondiale. A ce niveau-là, on ne gagne pas d’argent. On perd 10.000€ par saison. On ne peut rien s’acheter par soi-même, il faut se battre tous les jours pour pouvoir s’entrainer. Quand on est 400e, je me souviens d’avoir battu Lajovic qui était 80e et je ne gagnais pas ma vie. Je suis donc devenu entraineur, j’ai eu mon diplôme, puis j’ai été dans une Académie à Cannes où était Daniil Medvedev à l’époque. J’ai beaucoup aimé être coach, j’ai beaucoup appris, j’étais encore jeune. Grâce à la Wild Card de 2017, j’ai recommencé à jouer. Je ne l’espérais plus, et depuis 2017, j’ai toujours continué à jouer. Je jouais les challengers et je me sentais parfois déprimé, je voulais arrêter car je ne gagnais pas d’argent, j’étais dans des endroits miteux. Mais ce qui arrive maintenant montre qu’à un moment donné, ça paye. Ça vaut vraiment la peine.
Q. Pouvez-vous nous dire comment vous vous êtes associé avec votre partenaire de double ?
R. Quand on joue en double, on pense toujours qu’on pourrait jouer avec un autre partenaire qui jouerait mieux. Si vous ratez un match, vous vous dites qu’il faut changer de partenaire. Donc, tout allait bien entre nous, mais nous n’avons plus joué ensemble pendant un moment. Je devenais moins ambitieux. Je voulais juste jouer pour le plaisir avec un ami. Comme Sam est un ami proche et que nous entendons très bien et que nous aimons bien jouer ensemble, nous avons recommencé à jouer tous les deux. Il a un enfant, il est aussi détendu que moi. Nous allons skier ensemble, on s’amuse bien. Toutes les semaines on reçoit des messages d’autres joueurs qui nous demande, faisons ceci, faisons cela… Comme Nicolas Mahut, on m’a dit que je pouvais jouer avec lui, je me suis dit c’est super, je vais lui montrer Monaco. Il semblait un meilleur joueur, mais nous sommes maintenant en finale avec Sam. Si vous allez jouer un tournoi ATP avec un autre, cela peut abimer votre amitié, donc avec Sam on est resté ensemble et on est récompensé. Je suis très content de partager l’expérience de ce tournoi avec lui. C’est du pur bonheur.
Q. Vous saviez que vous alliez jouer ensemble jusqu’à la fin de la saison, ou allez-vous changer quelque chose maintenant ?
R. Nous essayions de trouver des joueurs pour aller à Roland Garros. J’ai écrit à tous mes amis en France. Mannarino, Lestienne et d’autres. Avant, quand nous étions 90e ou 100e, on avait besoin d’un joueur dans le Top 50 pour pouvoir entrer. Avec Sam, on a donc décidé de jouer les Challengers. Mais nous voulions être suffisamment bon pour jouer les tournois ATP. Et maintenant, c’est génial, on va pouvoir tout faire ensemble. On n’a pas besoin d’un autre partenaire.
Q. A la veille de cette grande finale, comment vous sentez-vous ? Vous avez semblé dépenser beaucoup plus d’énergie, vous êtes peut-être fatigué ?
R. Non, physiquement, je vais très bien. Nous sommes professionnels, nous sommes sur le circuit toute l’année et nous sommes bien entrainés. Mais il faut être prêt mentalement. Le double n’est pas trop dur physiquement, mais mentalement c’est très exigeant. Si vous êtes au filet quand votre partenaire sert, vous ne touchez pas la balle pendant longtemps, c’est comme un gardien de but au foot, il faut rester hyper concentré car tout peut arriver en une seconde. Aujourd’hui j’étais fatigué, je n’avais pas bien dormi la nuit dernière, et je suis très content qu’on ait pu gagner. Donc physiquement, tout va bien. Il nous faut aussi gérer toutes les demandes. Je suis content évidemment d’avoir à gérer ça ! Tout ira bien, on sera en forme demain.
Q. Je suis sûr que vous sentirez la pression demain en vous retrouvant sur le court central, et vous essaierez de tout faire pour gagner, comment allez-vous gérer ?
R. Honnêtement, je ne sens pas trop de pression. Je suis déjà très content d’en être à ce stade. Ce n’est pas par manque d’ambition, mais c’est comme ça qu’on fonctionne. Quand on est détendu et qu’on prend du plaisir et qu’on vit le moment présent, ça marche pour nous. Si on commence à penser qu’il faut gagner, c’est fini. On n’arrive plus à jouer le point. Je vais lui dire, jouons notre jeu, prenons du plaisir, il ne faut avoir aucun regret. Nous allons bien nous préparer pour demain et nous allons essayer de bien jouer et de profiter du moment. Nous allons utiliser l’énergie sur le court. Si nous gagnons ce sera exceptionnel, si nous perdons, nous devons en tout cas nous amuser et rester dans le moment présent.
FastScripts Transcript by ASAP Sports